31

janv.

AYMERIC LOMPRET - YOLO

SALLE SISIA - CENTRE CULTUREL TJIBAOU

Nouvelle Calédonie

Angela R. Productions et Bleu Citron Présentent

AYMERIC LOMPRET ET SON SEUL EN SCÈNE – YOLO

Yolo” c’est l’acronyme anglais pour dire qu’on ne vit qu’une fois, (You Only Live Once).  Ça sous-entend qu’il va peut-être s’agir de revoir le classement de nos priorités. Un genre de carpe-diem en injonction plus catchy quoi.

Pendant que certains attendent encore Godot, Aymeric Lompret cherche son chien.
Chacun ses priorités, comme on vient de dire. Ça confirme au passage que nous sommes au théâtre où Yolo se trouve être aussi le titre du nouveau spectacle d’Aymeric.
L’artiste s’affranchit des codes du stand up pour mettre son grand talent de comédien au service du personnage qu’il incarne. En l’occurrence un sans-abri qui a fait le choix de continuer à rire, même dans l’adversité (You Only Live Once). Un de ces illustres clochards célestes, drôle sans jamais être cynique, qui trouve devant nous le bout de trottoir qui accueillera le campement de ce soir. Quelle distance y’a-t-il entre ce personnage et le comédien qui lui donne vie ? C’est fluctuant à vrai dire, volontairement flou car en fait on s’en fout. L’enjeu véritable c’est l’histoire que ces deux-là nous racontent. Le propos d’un Lompret toujours plus ciselé, précis, la résonance sociale et humaniste derrière la vanne qui tombe, les envolées absurdes, la fausse naïveté, la vraie désinvolture…. Ce qui importe vraiment c’est de rester sincère, ne jamais faire le malin ni jouer au donneur de leçon.

ll paraît qu’on ne vit qu’une seule fois, donc, en toute logique, on n’a pas grand-chose à perdre. Sous sa tente, en tout cas, le punk à chien SDF, Aymeric Lompret, se dit qu’il aimerait bien avoir quelque chose à perdre, mais qu’en attendant il retrouverait bien son chien Antoine. Ce qui l’arrangerait bien parce que, quitte à parler dans le vague de la pauvreté, de la malbouffe, du climat, de notre système de soins ou des politiques, autant que ce soit avec quelqu’un qui a la politesse d’écouter ! … A défaut, peut-être cherchera-t- il par tous les moyens à attirer notre attention. Et pour cela, n’en doutons pas, il a ce qu’il faut en magasin. Car de langue de bois ou de mots doux avec lui il ne peut y avoir. Non, il préfère de loin les punchlines qui grat tent et dérangent, les vannes souvent féroces, parfois faussement naïves, qui déclenchent des malaises hilarants et mettent la lumière sur cette vaste blague que sont nos vies modernes. Car lui le sait bien, quand tout va mal, le rire est l’arme ultime pour survivre !

 "Hey vous avez pas vu mon chien? Mon chien ? J’ai perdu mon chien vous avez pas vu mon  chien ? Pardon excusez-moi je suis con vous pouvez pas répondre. Enfin vous pouvez  répondre mais j’entends pas, du coup c’est pas nécessaire de répondre."

Derrière son look de trentenaire désinvolte et fêtard, Aymeric Lompret dénonce en ricanant ce qui l’indigne sérieusement. Dans son nouveau spectacle Yolo, écrit avec Pierre-Emmanuel Barré, le Tourquennois campe Éric, un sans-abri parcourant la ville à la recherche de son chien. Une quête qui amènera ce “punk” à sortir les crocs devant les inégalités les plus criantes de notre époque, amochant au passage quelques privilégiés et autres cyniques. La preuve…

Il paraît que vous vous êtes d’abord dirigé vers des études de commerce… J’étais plutôt bon élève au lycée, j’ai suivi une prépa HEC sans vraiment savoir ce que c’était. Mais on m’a rapidement invité à partir. Les gens commençaient à mettre des p’tits clous sur ma chaise… Je n’y suis resté que trois mois.

Vous étiez donc calme et studieux ? À partir de la prépa, plus vraiment. Surtout quand je me suis rendu compte que j’étais en classe avec 30 Serge Dassault. Il n’y a pas trop de mixité dans les grandes écoles.

Vous étiez quand même un petit gars de droite au début ? Je crois que j’étais apolitique mais, comme j’étais dans une école d’économie, je dirais oui, parce que l’économie c’est de droite. Après HEC j’ai travaillé à l’usine et c’est là que j’ai constaté de grandes disparités. Alors, j’ai décidé de quitter le côté obscur. Avant j’étais trop jeune pour comprendre tout ça.

Vous avez aussi été animateur de village vacances, de cours d’aquagym… Oui, j’ai fait plein de petits boulots. On fait ce qu’on peut !

Pourquoi avez-vous décidé de monter sur scène ? Pour séduire des filles faciles et boire gratuitement !

On décrit souvent votre humour comme “trash” ou “noir”. Et vous, comment le définiriez-vous ? Chiant et long.

ous fixez-vous tout de même des limites dans l’écriture ? Non. La seule limite, c’est si c’est drôle ou pas. Je présente le sketch à mon chien et s’il rigole, alors c’est bon.

N’avez-vous pas d’autres spectateurs que votre chien ? Non, j’ai très peu de copains. Et si je joue devant eux ils vont me piquer mes blagues. Dans le métier on n’a pas de vrais amis Madame !

D’où vient cette approche “sociale” dans vos sketches ? De mon passage à l’usine. Cela a été le déclencheur. Je crois que Shakespeare disait : “si l’art ne dénonce pas, ce n’est plus de l’art, c’est du design”. Mettez ça, c’est classe ! En fait, je crois que tous les humoristes dénoncent quelque chose.

Vous engagez-vous concrètement d’une autre manière ? Ouais, je suis allé voir deux fois les Enfoirés en concert !

En quoi vos origines nordistes influencent-elles votre écriture ? Ça me permet de commettre beaucoup de fautes d’orthographe ! Je ne crois pas trop au régionalisme culturel. À part les gens du sud qui ne font que de l’humour de droite.

D’ailleurs, qu’est-ce qu’il y a de plus ch’ti en vous, à part la bière ? Mon amoureuse, elle a 12 ans.

N’êtes-vous jamais vraiment à jeun avant de monter sur scène ? Non, ça y est, j’ai changé… maintenant je suis très très bourré ! J’ai évolué grâce aux conseils de mon médecin.

Quel serait votre plus gros bide sur scène ? Je ne m’en souviens plus, parce que je suis toujours bourré !

Plus sérieusement, vous avez écrit une chronique sur le syndrome de l’imposteur, sur France Inter. En quoi ce sujet vous touche-t-il ? Je pense que tout le monde l’a, quel que soit son métier. Peut-être un peu plus quand on monte sur scène. D’ailleurs heureusement qu’on l’a. Je ne sais pas si j’irais voir le spectacle de quelqu’un qui ne souffre pas du syndrome de l’imposteur.

Parlons de votre nouveau spectacle. Pourquoi s’appelle-t-il Yolo ? Ça veut dire “you only live once”, soit “on ne vit qu’une fois”. C’est ironique. Je me moque des gens qui disent tout le temps ça.

Ce n’est donc pas votre philosophie ? Non. Par contre, c’est un fait, je dis souvent que la vie n’est pas un sprint, c’est un marathon. C’est moi qui ai dit ça, notez-le !

De quoi allez-vous nous parler cette fois ? C’est l’histoire d’un sans-abri, Éric, qui a perdu son chien dans la ville où je joue et qui le cherche pendant 1 heure 10…

Vous ne voulez pas trop en dévoiler ? Non ! (rires)

La pandémie, la guerre, la crise écologique et sociale… N’est-ce pas une époque inspirante pour les humoristes ? Je pense que toutes les époques l’ont été. C’est la merde depuis un p’tit moment. En fait, depuis qu’il y a des humoristes c’est la merde. Il y a juste plus de canaux de diffusion maintenant. Il y a toujours les riches qui font chier et les autres. Faut les pendre !

Y’a-t-il des choses que vous regrettez ? Votre passage dans On ne demande qu’à en rire par exemple ? Non, je ne crache pas dans la soupe, ça a été une formation très sympa.

Alors, ne regrettez-vous pas parfois, secrètement, d’avoir claqué la porte de HEC ? Non. Je regrette de ne pas l’avoir claquée assez fort ! (rires)

Sinon dans la vraie vie, il est vraiment sympa Guillaume Meurice ? Non. C’est un égoïste qui ne pense qu’à lui. Mais sa copine est sympa !

Auteurs :  Pierre-Emmanuel Barré et Aymeric Lompret 

Mise en scène :  Pierre-Emmanuel Barré 

Interprète :  Aymeric Lompret